Jour 8

A la recherche d'une tête familière pour terminer cette soirée vraiment éreintante, et c'est là que je croise le regard d'Emile, mon réalisateur de film. J'en oublie les clashs, les propos de certaines personnes et je viens me poser dans un fauteuil tout près de lui. « Et bah alors Spielberg, t'as pas l'air très en forme... » que je dis en plantant mon regard dans les belles prunelles brunes d'Emile. Je prends une nouvelle bouchée de glace. Si on ne m'enlève pas le pot des mains, j'ai peur de ce que je verrai sur la balance demain matin.

J'arrive au salon extérieur, plaid en main. Démaquillée, cheveux noués sur le haut de la tête dans un chignon totalement négligé - pour pas changer, portant un seul sweat très large qui me tombe au milieu des cuisses. Je rejoins Eden et Emile, déjà installés là-bas. « Une clope, d'la glace... j'tombe au bon moment dis-donc. » Sans leur demander leur avis, je m'installe sur le même fauteuil qu'émile, lui offrant la moitié de la couverture que je pose sur mes genoux.

A l'évocation même de ce prime, je soupire très fort et très longuement. « J'oublierai pas mes dolipranes pour le prochain prime. » Il faut avouer que c'était plutôt pénible à vivre ce soir. Clémence finit par nous rejoindre, mon sourire se creuse un peu plus. Je me redresse un peu pour lui laisser de la place sur le fauteuil déjà occupé par Emile et moi-même. « Quelqu'un en veut ? » Je tends le pot de glace, dans un regard implorant en mode ''sauvez moi de cette malédiction, c'est pour mon bien !''. « La liste serait tellement longue à énumérer. Entre Achille et Pénélope, Albéric qui a décidé de jouer le réactionnaire à deux balles... »

Si quelqu'un veut d'la glace? « Yep, moi, steuplait! » Je saisis donc le pot qu'il me tend, avec sa cuillère par la même occasion et j'en prends quelques bouchées, écoutant Eden énumérer tous les cons de la soirée. Je reste silencieuse, maintenant que je suis calmée, ça ne sert plus à rien de rebondir. Autant sauver cette soirée du mieux qu'on le peut, et la terminer sur une bonne note!

A partir du moment où Clémence s'empare du pot de glace, j'cache mes mains, fait tout pour qu'elles ne soient pas en évidence, histoire qu'elle ne me refile pas à nouveau le pot par la suite. J'entonne un léger rire lorsque qu'Emile est surpris de savoir qu'il y a un Albéric parmi nous. « Content de voir qu'il ne t'a pas tant marqué que ça. Tu dois commencer à t'habituer à les conneries et t'en accommoder sans trop de soucis. » C'est ça que j'avais besoin pour cette fin soirée. Emile et sa (trop) grande assurance. Clémence et sa (trop) grande naïveté. Je m'affale un peu plus sur le fauteuil, le regard au loin, sans trop capter quelque chose de précis. « J'ai entendu dire que Hayden y a passé une nuit. Malheureusement pour toi, je n'en sais plus et de tout façon, je ne suis pas certain que tu tiens tant que ça à savoir. »

« Albéric, rien qu'à entendre son prénom, j'ai mal à la tête. » je souffle, dans un soupire. Je continue de manger de la glace, tranquillement, toujours en apportant la cuillère à ma bouche de façon retournée, parce que j'ai toujours mangé mes yaourts comme ça. Quand Emile s'inquiète de son hygiène, je hoche la tête de gauche à droite. Non, rien d'alarmant. Enfin, pas pour le moment. Quand j'entends Eden parler de son homophone, j'esquisse un léger sourire en coin, guettant la réaction du gosse. « D'après c'que j'ai vu, il n'y a pas que là-bas qu'il a passé un bon moment. » Je laisse un léger rire m'échapper, j'étais la première au courant, et maintenant la France entière ainsi que tous les candidats le sont aussi. « Pfiou. J'avais pas signé pour autant d'émotions moi. » Je dis, alors que je repose la glace et la cuillère sur la table avant de laisser tomber ma tête en arrière sur le canapé commun qui nous héberge tous les trois.

J'échange un petit regard avec Clémence quand elle parle d'Hayden et des autres endroits où il se serait bien amusé. Pas besoin d'aller chercher très loin pour comprendre à qui elle fait allusion. Je me mords simplement la lèvre sans rien ajouter. Je m'allume une clope en même temps que la blonde avoue ne pas avoir signé pour autant d'émotions. « Je commence tout doucement à me dire pareil. » Oui, il fallait bien l'avouer, finalement, j'ai moins de facilité que prévu à trouver à ma place ici. Emile demande si l'un d'entre nous peut dormir avec lui ce soir. « On pourrait dormir tous les trois ensemble ? On rapproche deux lits, histoire d'avoir assez de place. » que je propose d'un air léger, le plus naturellement du monde.

J'affiche un léger sourire cristallin en faisant face à la sensibilité des deux garçons. Je ne dis rien, mais j'observe que chacun à leur manière, ne sont pas aussi durs qu'ils ne le prétendent. Et rien que ce petit espoir, ça me conforte dans l'idée de continuer l'aventure, au moins pour continuer à côtoyer des candidats comme eux. Humains. « Pourquoi pas. » J'acquiesce, allongeant mon bras pour piocher une clope dans le paquet d'Eden et lui sourire de façon angélique pour éviter de le voir froncer les sourcils. Je l'allume, crache mon premier souffle de fumée vers le ciel, et décide de briser le silence qui s'était installé depuis quelques secondes. « Après, j'sais pas si Emile va vouloir... j'ai cru comprendre qu'il n'était pas trop chaud pour les expériences trop inédites. » je dis, faisant allusion à un plan à trois. Bien-sûr que je rigole, ça se voit dans le sourire malicieux qui s'affiche au coin de mes lèvres et dans le regard pétillant que je lance à l'échappé lunaire.

Emile pas très chaud pour de nouvelles expériences ? Plutôt ironique pour un metteur en scène. Je reporte mon attention sur lui et son débit de parole impressionnant. Et j'y comprends absolument que dalle. Je me pince les lèvres pour ne pas me mettre à rire devant le long monologue d'Emile. Ce mec, il est pas d'ici. Je sais pas d'où il vient, mais il est clairement pas d'ici. « Non mais attendez, faut m'expliquer le délire du parachute là, j'suis pas du tout. » Emile se rend compte que Clémence plaisantait et j'peux presque comprendre son fugace moment de solitude. Ce duo magique, Emile/ Clémence, ça fait des étincelles c'est dingue. Je les regarde tous les deux, plutôt amusé par la situation. « Le répétez pas aux autres, mais vous êtes mes préférés ! » que j'avoue dans un sourire sûrement un petit peu niais.

Quand je vois Emile prendre au premier degré ce que je viens de dire, je ne peux pas m'empêcher d'esquisser un sourire en coin. Je le retiens de grandir, pour ne pas le perturber dans son explication, et une fois finie, je plonge mes yeux dans les siens avec un sourire complètement amusé qui illumine mon visage.« Oui, c'était une blague... » Je plante mes dents dans ma lèvre inférieure, lâchant néanmoins un léger rire qui s'estompe rapidement. « Mais... c'était très intéressant de découvrir ta théorie, qui me semble bien fondée. [...] J'ai jamais parlé de le faire en parachute... » je dis, à voix basse, sur un ton de confession accompagné d'un regard complice. Ça, c'était une idée de Shiva. L'autre jour, j'avais seulement évoqué un bus sur la 66, et ce soir, je faisais allusion à un plan à trois. Eden, un peu perdu au fil de la conversation, nous demande de lui expliquer un peu mieux ce qu'il se passe. « C'est juste émile, il préfère danser à l'horizontale. » je chuchote légèrement, même si ma voix cassée m'empêche de le faire sur toute la longueur de la phrase. Je tire ensuite sur ma cigarette, lorsque eden nous avoue qu'on est ses préférés. Un sourire sincère m'imprègne, de la même manière que ce baume invisible qui passe panser mon cœur. Aucun doute, il me fallait terminer cette soirée en compagnie de ces deux-là ! « Merci. » je dis, à voix très basse. Je n'aurais peut-être pas du, mais je l'ai pensé tellement fort que... c'est dit.

''Emile préfère danser à la verticale'' Oh. Je hoche la tête d'un air entendu, tirant une taffe de ma cigarette. C'est fou comme la nuit pousse à se confier sur tout et n'importe quoi. « T'as bien raison, la normalité a du bon, même si t'es pas quelqu'un de normal. » Taquinais-je Emile dans un léger rire. Dans la dynamique de cette nuit, je me laisse aller à une petite confession les concernant. C'est dit, et je n'attendais pas réellement de réactions de leurs parts. C'est simplement un moment de faiblesse, un petit côté vulnérable qui ressort. « Des améliorations ? Tu nous changeras plus Emile, nous sommes des causes perdues. » Je me lève à mon tour, jetant ma cigarette plus loin. Il était temps d'aller dormir, et je crois que j'aurais pas trop de mal à trouver le sommeil.

Je taquine Emile, et il tombe dedans. Comme toujours. C'est ce qui me fait rire, d'un rire doux, un rire sensible. Quant à Eden, il m'extirpe un beau sourire suite à sa confession. Je vais me coucher les idées plus claires ce soir, et surtout l'âme plus légère. Je les suis donc en direction de la chambre, tuant d'abord ma cigarette dans le cendrier sur la table.