Jour 26

Après m'être vêtue d'une petite robe de plage couleur de sable, j'arrive à la piscine une pomme à la main. Je remarque alors Sheila, une des nouvelles candidates. Immédiatement, un large sourire se peint sur mon visage et je m'approche d'elle, toute guillerette. Je m'assois sur une des margelles et trempe les pieds dans l'eau, tandis que Sheila barbotte tranquillement. Je lui demande alors, soucieuse de son intégration dans la maison des secrets : « Alors, comment se passe tes débuts ici ? Tu trouves tes marques, ça va ? ».

En venant me rejoindre sur le bord de la piscine, elle m'explique qu'elle s'est déjà fait quelques alliées, mais que malheureusement, elle s'est aussi fait des ennemis. Je grimace légèrement, et continue lorsqu'elle m'affirme qu'il faut avoir des ennemis. Je la regarde en arquant un sourcil, puis avant de recoiffer une mèche rebelle lui demande : « Typiquement, tu vises qui quand tu parles d'ennemis ? Je veux dire, ici, je n'ai pas l'impression de vraiment avoir d'ennemis, personnellement. Tout le monde à l'air gentil, du moins, de ce que j'en ai vu ». Il est très rare que je n'aime pas les gens, et les vrais fauteurs de troubles de cette maison sont déjà partis. Aujourd'hui, il ne reste que des gens que j'apprécie de prêt ou de loin, et pour la plupart de prêt, pour être tout à fait honnête. Elle me demande alors si ma discrétion ne risque pas de devenir mon principal défaut ici, si je n'ai pas peur qu'à la longue, cela me joue des tours. J'hausse des épaules comme indifférente, avant qu'elle n'ajoute que mon nouveau trio saura me protéger. « Si ça doit me jouer des tours, alors ça m'en jouera, mais tu sais, Sheila, c'est aussi ce qui fait de moi ce que je suis. Je suis une fille timide, assez discrète, et je n'aime pas vraiment être au centre de l'attention, encore moins des histoires ... Alors oui, j'en conviens, dans un jeu comme celui-ci, il est typiquement impossible de gagner avec mon profil, surtout lorsqu'on joue contre des candidats aussi charismatiques et sûrs d'eux que ceux qu'il y a ici ... Mais je veux dire, après un mois d'aventure, je suis toujours là, je n'ai certes fait qu'un seul SAS, mais toujours est-il que je l'ai fait et en suit revenu, ça veut dire que malgré tout le public a su voir plus loin que juste qui j'étais et qui on voulait faire croire que je suis. Et je suis heureuse que ça soit le cas, et espère que ça continue ! Je la regarde en souriant, puis réalise que je parle trop, une nouvelle fois. Je m'emporte si souvent dans de longues tirades duquel n'importe qui en perdrait le fil ... Je dois rester concentrer, mais tout de même, je décide de lui répondre concernant le nouveau trio. J'ai eu de la chance de tomber avec deux des personnes dont je suis le plus proche ici. Chani est un peu comme ma grande soeur, en quelques sortes. Elle me protège des autres quand il le faut, quand bien même je n'en aurais pas vraiment besoin. Et Karl, depuis notre dimension en semaine une de l'aventure, nous sommes restés relativement proche, et je sais que je peux lui faire confiance ! J'ai vraiment de la chance, et ils me défendront, autant que je les défendrais, pour sur ! ». Lorsqu'elle m'a répondu, elle m'éclabousse en riant, et je laisse s'échapper quelques notes aigues et fluettes de ma bouche à mon tour, avant qu'elle ne m'invite à me baigner. J'opine de la tête et me relève pour mieux enlever ma robe de plage. J'ai, en dessous, un petit bikini blanc qui, je le crois, me va à merveille. Je décide d'emprunter les marches pour ne pas sauter d'un seul coup dans l'eau, puis lorsque je suis suffisamment proche de Sheila, lui lance de l'eau au visage comme elle me l'a fait, je rétorque dans un rire « Moi aussi, je sais faire ! ».

Sans détour, Sheila m'explique qui sont ses ennemis ici, ou plutôt : son ennemie. Il s'avère donc que Kirsty est une fille qui a tendance à juger rapidement, et qu'elle a réitérer l'opération plusieurs fois, donc une avec Chani. Je ne la connais pas, mais visiblement, elle ne prend pas un très bon départ, mais en chrétienne que je suis, je me dois d'essayer de soutenir mon prochain : « Peut-être que vous vous êtes simplement mal comprises, ou peut-être qu'elle s'excusera pour repartir sur de bonnes bases ? Il ne faut pas être trop négative, peut-être que ça s'arrangera avec le temps ! ». Sans même vraiment savoir le fond du problème, j'essaye d'en arranger la forme. Je déteste les conflits, et essaye de résoudre celui là puisqu'il s'agit de deux personnes qui se connaissent à peine et ont simplement basé leur relation sur des aprioris. Enfin, elle m'affirme qu'il n'y a rien de mal à être discrète, mais qu'il faut que je fasse attention à ne pas m'effacer pour autant (à l'instar d'Athéna, qui a littéralement disparu de la circulation depuis quelques temps). J'acquiesce alors, puis réponds « J'essaye de vivre et d'exister par moi même, je veux dire, je ne dois pas me substituer par des clashs ou d'autres choses, je suis moi, et je dois le rester. Mais je ne pense pas être trop discrète ... Peut-être que j'ai tendance à perdre pieds et ne pas avoir suffisamment confiance en moi pour aller vers les autres, et je le reconnais, c'est vrai, mais je veux dire, je suis toujours là, quelque part, j'essaye de faire du mieux que je peux ». Elle me demande ensuite si depuis la révélation de ma mission avec Corentin, quelque chose à changer à mes yeux au niveau de l'aventure. « La mission avait pour principal atout de nous rapprocher tous les quatre, mais en même temps et c'est assez paradoxal, je n'avais jamais été aussi éloigné de mon frère que je l'ai été. Maintenant que la mission est terminée, je suis de nouveau très proche de lui et ça me fait du bien de le retrouver tel qu'il est, de pouvoir être officiellement la soeur de Corentin, tu vois ce que je veux dire ? Après, depuis que la supercherie a été révélée j'ai peut-être l'impression d'être moins proche de l'autre duo de frère et soeur ... Je ne sais pas vraiment ». Enfin, après une petite moue dubitative, elle m'explique que si mon duo tombe si bien, c'est un peu grace à eux. « Tu dis que je suis un trio par défaut, et après tu me demandes de te remercier, c'est un peu bizarre ça, pas vrai ? » je dis en riant avant qu'elle ne m'envoie une énorme rafale d'eau en pleine tête qui m'éclabousse entièrement et mouille mes cheveux. Je laisse échapper un cri aigu puis la regarde en ouvrant de grands yeux ébahis. « Si j'avais eu de la force, je t'aurais coulé, pour sur ! Tu t'en tires bien ! » je dis en la regardant avec déception, avant qu'elle ne me demande si je suis quelqu'un de pieux. « Je suis pratiquante, et je fais attention a rester dans les clous, je ne veux pas faire trop d'écart dans ma vie et tient à ce que chaque chose soit à sa place en temps et en heure. Mais je profite de la vie, je veux dire, il m'arrive de boire, je sors dans les clubs, dans les bars. Parfois je vais avoir mon frère Corentin dans des bars gay, je veux dire, je profite de la vie même si je ne fais rien qui serait jugé illégal ou dangereux ... je la regarde ensuite puis retourne la question : mais si tu me demandes ça, c'est que toi tu ne l'es pas vraiment, je me trompe ? ».

Lorsqu'elle m'explique, non sans déception, que Kirsty ne viendra très certainement pas s'excuser auprès d'elle dans les prochains jours, la faute à un caractère de cochon trop bien trempé, je grimace à nouveau. « Pourquoi les gens doivent toujours être si pénibles ... je m'exaspère alors dans un souffle avant de porter ma main sur une de mes tempes. Je ne peux pas comprendre ce besoin de toujours se donner en spectacle dans le but soit d'enfoncé les uns soit de se faire briller soi-même ... Je veux dire, à quoi ça mène ? Tu risques de te ridiculiser à chaque instant, et tu perds tellement de temps dans ce genre de sottises plutôt que de réellement profiter de ce que ta vie peut t'offrir ... Ces gens là me font de la peine, Sheila, je les trouve si pathétiques ... ». Je me reprends alors presqu'immédiatement et ajoute : « Enfin je ne connais pas vraiment Kirsty, je dois attendre de me faire mon propre avis pour juger, mais si elle est telle que tu la décris, alors je suis d'ores et déjà déçue ... ». Ce besoin d'attirer les projecteurs sur soi et un besoin que je ne comprendrai jamais. Je suis très bien dans ma vie, dans mes bottes, je sais ou je vais et n'ai besoin de l'approbation de personne pour faire ce dont j'ai envie. Et je n'ai encore moins besoin de descendre qui que ce soit pour avoir l'impression d'exister. Finalement, elle parle à nouveau de ma discrétion et me demande si je compte m'en servir à bon escient afin de retourner la maison sans dessus dessous et parvenir à mes fins. « La vraie question, c'est aurais-je besoin de le faire ? Je veux dire, quand bien même les habitants auront décidé de me mettre dans le SAS, si le public veut de moi, je reviendrais dans la maison. Et si jamais ce n'est pas le cas, cela voudra donc dire que j'aurais fait mon temps ici. Je veux aller le plus loin possible, cela est certain, mais ce que j'essaye de dire, c'est que si je ne suis pas sensé aller loin, alors mon parcours s'arrêtera là ou il doit s'arrêter. Et avec un peu de chance, ce sera en finale ». Lorsqu'elle me demande ensuite ce que je pense de ma relation avec Mona-Lisa et Mattéo, je reprends la parole dans la continuité de ce que j'avais commencé à dire : « Je dois dire que je ne suis réellement attachée qu'à Corentin ici, et chaque semaine, devoir nominer deux personnes, ça peut être très dur pour moi car je ne suis pas très douée à ça, mettre les gens à la porte, ce n'est pas mon domaine, je suis plutôt du genre à tout faire pour qu'ils restent. Mais je veux dire, si jamais c'est entre eux ou moi, et qu'il n'y a vraiment que ma décision pour trancher, alors oui peut-être que je les ferais passer après. Mais dans tous les cas, ma réelle priorité ici, c'est Corentin. Il passe avant tout pour moi, et je ferais tout pour que lui remporte l'aventure ».  En parlant de Corentin, voilà qu'elle me demande si son homosexualité n'a pas été un frein dans notre relation, et dans notre famille. J'arque un sourcil alors, surprise, puis rétorque aussi sec : « Cela aurait-il dû l'être, Dur ? avant d'ajouter, L'amour n'a pas de barrière, Sheila, on ne le cantonne pas à des codes et normes sociales, ça va au delà de ça. Quand Dieu à dit aime ton prochain, il n'a mentionné ni sexe, ni genre, ni couleur de peau. Contente donc toi d'aimer, sans haïr ceux qui aiment plus que toi. Le jour ou Corentin m'a annoncé qu'il était gay, de manière officielle je veux dire, je n'en ai eu que faire. Il est mon frère et le restera quoi qu'il arrive. Je ne suis pas de ceux qui iront dans la rue à l'encontre des autres. J'aide ceux qui veulent mon aide, laisse faire ceux qui n'en veulent pas, mais je n'interfère pas dans les bonheurs personnels de tout un chacun. Et Corentin, il mérite d'être heureux, et cela implique qu'il aime qui il a envie d'aimer. Et cela a été la même chose avec mes parents, nous sommes très ouverts là dessus, et à vrai dire, il m'est difficile d'imaginer un monde dans lequel nous ne le serions pas, pourquoi ne le serions nous pas ? Il faudrait qu'on parte du principe que l'amour que porte Corentin à son entourage n'est pas normal, mais Corentin aime qui il a envie, et ça ne changera jamais rien pour moi ! » oops, j'ai encore beaucoup trop parlé ... Et cette fois, vraiment trop. Je la regarde alors en recoiffant une mèche dégoulinante, lorsqu'elle m'explique ne pas croire en Dieu, et qu'elle est même du genre à contourner les règles pour arriver à ces fins. Je réponds alors, hésitante : « Je ne te jugerai pas, tu sais, et je n'essaierai pas de faire de toi ce que tu n'es pas. Simplement j'espère juste que tu sais ce que tu fais, et que tu ne joues pas trop avec le feu, parce que le retour de flamme, parfois, peut faire très mal ... ». On le sait, prendre des risques peu parfois être dangereux, et lorsque l'on contourne les règles, l'impact ne peut qu'être plus violent. Elle me demande ensuite si je ne suis pas freiné par mon honnêteté dans la maison. J'hausse naïvement des épaules : « Pas vraiment, je veux dire, je n'ai jamais eu a mentir pour l'instant, j'ai toujours été honnête avec les autres et moi même, on verra comment les choses évoluent dans les prochains jours, mais jusqu'à maintenant, tout s'est bien déroulé. Je veux dire, ça peut être compliqué, bien évidemment, mais si on fait les choses correctement, alors les gens comprendront, en cas de dilemmes, ils savent que nous n'avons pas le choix, donc ce n'est pas grave. Si les gens nous aiment, ils passeront au dessus de ça ! ». Je commence ensuite à greloter légèrement ... L'eau de la piscine, bien que suffisamment chaude pour la saison, me gèle de l'intérieur, et mes cheveux mouillés deviennent un fardeau. Je décide donc de souhaiter bonne fin d'après-midi à Sheila en sortant de l'eau, avant d'ajouter, au seuil de la maison : « Ca m'a fait très plaisir de te rencontrer pour de vrai, en tous cas ! J'espère qu'on aura l'occasion de discuter de nouveau, un de ces quatre ! ». Puis je m'en vais prendre une douche bien chaude.