Soirée horreur

(+TENUE)

Romane assiste à la scène, les sourcils froncés. Euh... Est-ce que Charlène a assisté à la même scène qu'elle avant d'ouvrir la bouche ? Elle a vraiment pas l'impression de son côté.  « Donc je résume, Steven arrive à la soirée en demande comment ça se passe. Vincent lui dit de fermer sa gueule et c'est à Steven qu'on reproche son manque de respect alors qu'il a même pas rétorqué quelque chose à Vincent. » Elle rit légèrement. Euh oui définitivement, on pouvait faire de nombreux reproches à Steven, il n'est pas tout blanc mais là, dans ce cas là, elle trouve ça totalement injuste et n'hésite pas à le dire.

C'est bon... je me suis calmé. Je me relève donc, puis je me redirige vers les personnes présentes à la soirée. « Désolé ! Même moi, je ne me suis pas reconnu, là. ». L'enfermement m'a fait péter les plombs, c'est indéniable.

Charlène s'approche de moi, sans caresse ni petites attentions. Quelle régression putain. A l'aube ou tout pourrait devenir incroyablement mieux, tout semble s'effondrer. Elle me parle de la love room, malheureusement pour moi, oui, l'embardée va couper court et je risque de bientôt devoir retrouver mon lit ... Malgré moi. "Il faut un retour à la réalité, pour chaque chose ..." Je souffle en buvant une gorgée de mon verre avant de me rendre compte que ma phrase fait vraiment double sens. Elle est presque tranchante. Je relève les yeux sur la blonde, avide de sourire. A vrai dire, je ne sais moi même qu'en penser. Ou est-ce que tout ça nous a mener ...? Je ne sais pas ... Je reste silencieux. Je ne sais trop quoi dire maintenant ... Je n'entends que vaguement l'intervention de Romane, trop perdu dans mes pensées.

Pour une fois, on pouvait dire que Romane faisait peur à voir et ce sera surement l'unique fois où elle le tolèrera d'ailleurs. Habillée en l'enchanteresse -clin d'oeil à la sortie au cinéma de suicid squad aujourd'hui en france, y a intérêt à ce qu'elle touche une prime pour la pub-, elle était méconnaissable. Elle ne rajoute rien de plus à ce que dit Charlène. Elle a tout à fait raison dans ce qu'elle dit, Steven a une grande gueule, il dit souvent de la merde mais Romane trouvait que le timing pour faire ce reproche là était très mal choisi vu que pour une fois justement, il n'était pas en tort. Elle prend donc le verre en la remerciant avec un sourire.  « C'est pas grave » fit-elle avec un sourire pour répondre à Vincent. Elle aussi la prochaine fois qu'elle pète un câble, elle dira toutes les méchancetés gratuites qui lui passe par la tête et s'excusera juste après, comme ça ça passe.  

"Ils sont infiniment meilleurs, je souffle doucement en détournant le regard. Ok, paye le coup de mou, là je ne me reconnais même plus moi même. Elle veut ensuite parler de ce qu'il s'est passé ? Très bien. C'est pas comme si j'avais déjà essayé, hein ? Je relève les yeux vers elle, nous sommes à plusieurs dizaines de centimètres de distance. Je suppose que c'est assez, pour le moment ? On est plus trop proches, personne ne devrait se sentir mal à l'aise ... "Je ne sais pas trop ce qu'il y a à dire, sans parler qu'on ai pas été clair sur notre relation, mais pourquoi t'es aussi distante ? Enfin je sais pas ... J'apprends pendant le prime que t'as dormi dans mon lit, tu apprends que j'ai dormi dans le tien, et depuis silence radio ..." Je me tais alors, et me contente de la regarder, sans ne rien ajouter pour l'instant.

J'ai l'impression d'évoluer dans un berceau d'illusions. De me noyer presque dans ces reflets étranges et amers qui sont ce que j'ai laissé entrevoir à mon esprit de ma relation avec Charlène. De couple il n'a jamais été question, mais j'ai comme l'impression que rien ne sera plus comme avant. Comme avant ce baiser. Je crois que je ne parviens pas à légèrement réprimer une grimace lorsqu'elle me dit qu'il n'y aura jamais plus que de l'amitié. Je le savais, et elle savait que c'était réciproque (bien que ça fait toujours mal de l'entendre, vous le savez sûrement aussi bien que moi). Je marque un temps, réfléchis quelques secondes, puis dis finalement doucement, dans un souffle : "Mais je sais qu'on ne sera jamais en couple, là n'est pas la question. Mais j'ai l'impression que, je sais pas, tu m'évites, ou que je t'évite, je sais pas. Mais qu'on n'ose plus se regarder dans les yeux, tout en continuant de parler je plonge mon regard dans le sien, je n'ose imaginer les sentiments qui passe de mes yeux aux siens, ils sont sûrement trop nombreux pour être interprétés, trop confus pour être démêlés, et je voulais pas qu'on se rapproche pour finir là, à se regarder en chien de faillance avec des verres pleins de colorants, au milieu d'une soirée ratée ... Je réprime un rire amer face à l'asburdité de la situation, enfin voilà. Moi aussi j'ai envie qu'on aille le plus loin possible. Ensemble. Et je ferais tout pour que ça marche ..." Je suis on ne peut plus sincère, je continue de la regarder, lorsqu'elle mouille le tee-shirt et se jette à l'eau. C'est une drôle de déferlante qui s'abat sur moi, un mélange de sentiments et d'émotions si intense que je sens légèrement mes mains trembler, ma gorge se nouer. Je ne sais pas s'il s'agit de jalousie. Si mon coeur s'est réellement accéléré, si j'ai vraiment serré le poing, mais tout va trop vite dans ma tête, à 100 à l'heure. Des millions de messages électriques qui parcourent mon cerveau en l'espace d'une demi-seconde. Je me concentre sur le reflet rougeâtre de mon verre, sur le halo tremblant qui ondule dangereusement au rythme de mes tremblements. Je baisse alors les yeux, respire doucement. Calmement ... Que m'arrive-t-il ? Je me ressaisis alors. Je ne suis plus moi. La jalousie, les crises, le dégout, se ne sont pas des émotions qui m'appartiennent. Je bois mon verre d'une traite avant de le poser quelque part pour ne plus remarquer que je suis incapable de le tenir fermement. Charlène a donc eu un raprochement amoureux avec Tanguy. Bon. C'est pas comme si je ne m'y attendais pas ... Charlène, elle la joue un peu comme moi, mais au féminin. Je garde les yeux rivés sur le sol. "Tant mieux pour vous, vraiment ! J'espère que ça marchera et que tu reviendras vendredi, pour lui ..." Pour lui, elle ne m'a rien promis, je ne lui ai rien promis, elle ne me doit rien. Je ne peux que lui souhaiter du bonheur, au fond. Je ne sais trop dans quel état je me trouve actuellement. Et je décide d'aller me coucher ... Je relève le regard vers Charlène, dépose mes lèvres sur sa joue, furtivement, puis lui souhaite bonne nuit. Je me retire ensuite du jardin, et vais dans l'éternelle love room, rejoindre une voluptée qui me dégoute actuellement ... Je n'ai pas le droit de réagir comme ça. Je n'ai pas l'habitude d'être du second choix.

Romane part dormir.

Je termine mon énième verre de Lipton et je me barre.