Jour 2

Alors que je m'attendais à un peu de calme, Sarah me rejoint bien vite. Humpf, à vrai dire, notre échange de toute à l'heure m'avait un peu refroidi vis à vis d'elle. Je me contente simplement de lui répondre, d'un ton cordial et neutre. « Exaspéré surtout. C'est un peu le bordel par ici. » fis-je en rapport avec le spectacle qui nous était offert dans le salon. « Et toi alors ? » A vrai dire, la question était un peu rhétorique étant donné ce qui s'était passé tout à l'heure. Mais c'était une manière de savoir comment elle allait.

J'avais l'impression d'être tombé dans un asile ou dans une garderie rempli de gamins décérébré. C'était pas facile à vivre et c'était plutôt rageant étant donné que j'ai voulu être là pour le jeu et pour le fun. Là je me retrouve avec des maternelles qui se crêpent le chignon pour un oui ou un non. J'en avais un peu ras le cul. Elle en revient à me parler de son anecdote. « Ecoute, personnellement, ce n'était pas à toi que je m'attaquais. J'ai juste corrigé un point qui me semblait essentiel, surtout quand on est regardé par des milliers de gens. Et ça n'avait rien à voir avec toi. Je comprends ce que tu peux ressentir, je comprends que ton corps aujourd'hui te pose encore soucis. Mais te laisse pas abattre par les remarques. C'est ce que j'ai appris à force. » Je marque une pause. « Je suis devenu imperméable aux moqueries et crois moi, derrière mon sourire, ça pas toujours été facile. » Je brasse un peu l'eau comme si j'étais plongé dans ma réflexion. « Et je sais que tu n'as pas voulu penser à mal et que dans notre société, on a encore à tord cette image mais être transgenre n'est pas une insulte. Beaucoup de personnes transgenres sont magnifiques. Je te conseille d'écouter leurs histoires et d'en rencontrer pour t'en rendre compte. » Petit point militantisme fini, j'espérais juste qu'elle comprenne le fond de ma démarche.

Sarah me présente ses excuses. Excuses que j'acceptais d'un léger sourire. Les quiproquo, ça pouvait arriver. Et surtout après ce qu'elle avait vécu, je ne pouvais que comprendre cet agacement. « On va finir dingue en sortant d'ici. » déclarais-je en un léger rire. On en revient à parler ensuite de l'attitude de Dior. « Dior est pas un mauvais garçon, je pense pas qu'il réfléchissait à mal. Il est maladroit, il joue beaucoup avec les autres. Mais je l'imagine un peu au dessus de toute cette provocation gamine. » Car oui, provoquer en soupçonnant quelqu'un d'être transgenre, c'était profondément gamin. « Expliquez vous calmement tous les deux. On est à deux jours du début de la compétition, vous aurez le temps de vous crêper le chignon. » Je souris légèrement amusé avant de rajouter. « Compte par sur la subtilité de son coté. Il n'a pas l'air trop d'en avoir si tu veux mon avis. » fis-je taquin. Je souffle, continuant à brasser l'eau. « J'espère que ça deviendra un peu plus calme d'ici les prochains jours et que le jeu commencera réellement, j'avoue que je suis pas trop venu pour voir 5 types se prendre le chou continuellement. » Au bout d'un moment, ça suffisait amplement. « Mais j'imagine que ton secret à quand même à voir avec ces séquelles dont tu parles non ? » Elle avait l'air bouleversée, alors soit elle jouait bien, soit ça lui pesait beaucoup.

Qu'on finisse à l'hôpital psychiatrique ? On y est déjà alors bon. Elle m'annonce ensuite qu'elle ne veut pas pour l'instant parler à Dior. « Vous voyez ça entre vous, je suis sûr que vous êtes assez grands pour vous parler. » déclarais-je avec un léger sourire. Après tout, c'était pas vraiment mes oignons mais j'espérais qu'ils étaient assez mur pour pas se parler sans se tailler en pièce. Elle me parle ensuite de caractère. Je fais une moue dubitative. « Sur ce point, je pense que Dior a pas tort, beaucoup se disent avec un fort caractère alors que la majorité d'entre eux sont juste en manque de notoriété. Chacun brille comme il veut, mais autant ne pas le faire pour les mauvaises raisons. » Briller pour une histoire de serviette et de knacki ball qui dépasse, on aura vu mieux. Elle ne veut rien dire sur son secret. « Fair game. » dis-je en me levant avec un sourire. J'aurais attendu qu'elle se confie un minimum mais soit. Je prends une serviette non loin avant de lui dire. « C'est pas tout ça, mais j'ai la tête comme ça après cette journée. Je vais aller me poser dans mon lit. » Je m'avance vers la sortie du jacuzzi avant de me retourner avec un sourire amusé. « Oh et fais toi plaisir hein, je vois que tu scrutes l'eau depuis tout à l'heure, elle est vraiment bonne. » Je quitte ensuite la pièce.