Jour 7

Après m'être levée, j'étais passée par la salle de bain. Je me changeais et je passais par la cuisine pour prendre une bouteille d'eau avec de rejoindre le jardin en tenue de sport. J'avais besoin de me défouler un peu et le sport était la meilleure des solutions à mon avis. Je m'approchais alors du sac de frappe, j'enfilais des gants et je commençais à frapper.

J'apperçevais Naïs en train se faire son sport et décidais de la rejoindre. Je me souviens de son regard de détresse hier et désirais en savoir plus! "Saluuut la mannequin! J'vois que ça a envie de se défouler!" disais-je en rigolant pour essayer de détendre la belle brune tatouée! "J'suis pas venu te voir hier pour ne pas être étouffant, mais explique moi ce qui allait pas hier...". Je lui souriais pour lui montrer que je suis là!

Alors que je frappais, Steven me rejoignait. Je ne m'arrêtais pourtant pas de frapper dans le sac. Il me demandait ensuite de lui expliquer ce qu'il s'était passé hier, notamment après le regard que je lui ai jeté. « Théo est venu me parler. Je lui expliquer plus calmement ce qui m'avait dérangé quand il est partit à l'autre bout du monde avec Emma. Et au final, j'ai crû comprendre qu'il était peut être amoureux d'elle. » Je tapais de plus en plus fort dans le sac lorsque je disais ces derniers mots, tellement j'avais la haine. Peut être que j'avais mal comprit, et que je me faisais des films. Peut être pas. C'était le problème avec Théo, il y avait toujours des sous-entendu dans ces paroles.

Naïs m'explique que Théo et Emma seraient partis ensembles loin de la France, qu'ils étaient amoureux, que ça la dérangait de les voir ensemble... euh wait j'comprends pas tout moi! "Mais pourquoi ça te déranges? Et genre Théo ça le dérange pas de me voir faire très clairement du rentre dedans a sa meuf?". J'essaie de reflechir, mais je ne comprends pas, a moins que... "Mais tu le connaissais d'avant Théo? Car t'as l'air méga attaché a lui!". Si ça se trouve je suis le seul a ne pas être au courant...

Steven me demandait si Théo ça ne le dérangeait pas qu'il fasse du rentre dedans à sa meuf. Sa meuf ? Ouais au final y'avait peut être que moi qui était aussi conne pour avoir un doute sur leur relation, les autres n'en avait pas : ils étaient en couple. Je frappais plus fort encore. « C'est pas sa meuf. C'était moi sa meuf. » Je finis par laisser tomber mes bras le long de me corps en soupirant. Je me tournais alors vers Steven. « Il m'a quitté il y a quoi, 1 mois, 1 mois et demi, parce que je l'ai gueulé quand j'ai su qu'il était partit avec Emma à l'autre bout du monde sans me prévenir. On se connait depuis qu'on est gosses, ais on a développé des sentiments plus qu'amicaux. Enfin j'ai... » J'enlevais mes gants et je les laissais tomber par terre. « C'est pour ça que j'étais mal à l'aise en le voyant hier. On ne s'était pas revu depuis qu'il m'a quitté. »

J'écoutes Naïs, et me rends compte que ça me fait de la peine pour elle... j'arrive a trouver le comportement de Théo nul alors que si j'aurais pu le faire il y a quelques mois je l'aurais fait, comme quoi Secret Story change un homme! Je prennais Naïs dans mes bras pour la reconforter! "Dis toi que si il t'aime il reviendra, et sinon c'est qu'il ne te méritait pas! Mais t'inquiètes j'vais leur parler pour au moins leur dire d'arrêter d'etre collés colle un mangeu et un porte-manteau ici, car ça te fait du mal pour rien!". Et puis je peux m'occuper de coller Emma si elle veut, comme ça elle peut voir son Théo dès qu'elle en a envie. Je prends mes gants de boxe et dis: "Tu veux te défouler sur moi? Ça se voit que tu maitrises la boxe!". Tout comme moi qui suis boxeur depuis plus d'une dizaine d'année!

Finalement Steven me prenait dans ses bras. Ca me faisait du bien, je me rendais compte que j'avais beaucoup de soutien ici et c'était ce qu'il me manquait. Dans ma vie de tous les jours je ne parle pas de mes problèmes personnels, et j'ai tellement de choses à faire que je peux même les oublier pendant ma journée. Je finis par faire une grimace. « Justement, j'ai peur de ça, qu'il ne revienne pas... » Je haussais finalement les épaules. Puis Steven me demandait si il voulait qu'on se fasse un petit match. « Avec plaisir ! » Je remettais mes gants en le regardant. « Merci. » Une fois fait je me mettais dans mon combat. « Tu feras attention à toi, j'en fais depuis que je suis gamine ! » Je riais légèrement.

Je me ramène au jardin pour griller ma clope. Naïs fait de la boxe, avec la chance que je me tape, je vais encore terminer avec un pain sur la gueule. Wesh vous deux. Ils ont l'air bien occupés, du coup je dérange pas et je grille ma clope tranquille. Si j'étais toi, je testerai pas Naïs sur ce terrain. Te fie pas à son sourire d'ange, quand elle frappe, tu le sens bien. Pour avoir déjà fait des sports de combat avec elle.

Naïs m'avoue qu'elle a peur que Théo ne revienne pas vers elle. "Mais si... regarde.." dis-je en montrant discrètement du doigt son ex/son mec qui était en train d'arriver. "wesh Théo!". La belle brune accepte le combat et m'avoue en faire depuis toute petite. "Ça nous fait un point commun, j'ai été plusieurs fois champion de boxe! Que le meilleur gagne ahah!". Théo m'avouait que Naïs etait plus dangereuse que ce qu'elle en a l'air et qu'elle frapper assez fort! "T'as du les mériter ces coups toi, non?" je rigolais puis mettais mon truc pour proteger la bouche, que le match commence! On s'envoie les premiers coups! Elle se débrouille bien, pour une meuf elle gère! Après j'ai déjà battu plusieurs mecs avec ce niveau, donc je ne m'inquiètes paaaas!

Théo arrivait finalement. Du coup on arrêtait la discussion avec Steven, je sais qu'il le gardera pour lui je ne me faisais aucun doute là dessus. Théo prévena même Steven sur ma force de frappe. Mais ce dernier me dit qu'il faisait lui aussi de la boxe depuis longtemps. « Trop cool un partenaire de boxe ! » On en croisait pas à tous les coins de rues. Je finis par rire amusée lorsque Steven dit à Théo qu'il avait dû les mériter ces coups. « C'est surtout que Théo pense me battre. Et ça depuis des années ! » Je souriais un peu plus et je continuais le combat avec Steven donne des coups par ci et par là et en esquivant d'autres.

J'ai un petit rictus moqueur, mais j'dis rien, on va encore m'accuser de vouloir foutre la merde. Mais c'est drôle de voir Steven se donner du mal comme ça. A lui tout seul, c'est la définition même de l'opportunisme. Je sais pas. Peut être. Naïs surenchérit sur le sujet. Je ris légèrement. J'ai déjà failli plusieurs fois ! Bon d'accord, c'était pas toujours réglo, mais je joue avec mes armes ! Je reporte mon regard sur Naïs et dévisage un p'tit peu la brune. T'es prévenu en tout cas Steven, à tes risques et périls !  

"Moi j'dis on se donne rendez-vous quand tu veux pour un petit combat, t'en une bonne adversaire même si..." je ne finis pas ma phrase et touche ma cible d'une façon assez classe, lorsque Naïs et Théo me disent que ce dernier a perdu plein de matchs contre Naïs! "T'as vu que j'me débrouilles pas si mal Théo, contrairement a toi!". Je me reconcentre ensuite sur mon match. Esquive, esquive, coup, like a boss!!

Steven faisait beaucoup trop le malin à mon goût. Il ne savait pas tout ce que j'avais dans mon sacs, et tous mes atouts pour gagner. Je continuais alors le match puis d'un coup je me posais par terre ne me tenant la cheville. « Aïe je me suis fais mal ! » Bien sur Steven s'approchait de moi et se mettait à ma hauteur. J'en profitais alors pour me relever et lui donner des coups jusqu'à ce qu'il tombe sur le sol. Je finis par rire, fière de moi. « On appelle ça la technique Nana, fourbe, vicieuse, mais efficace ! » Je riais un peu plus, ceci dit quand même éssouflée et je venais prendre ma bouteille d'eau pour boire.

Il s'en sort mieux que moi ? J'ai envie de lui demander de quoi il parle en particulier, j'suis sûr qu'il se perd lui même dans ses pensées. Concentre toi sur ton combat au lieu de faire le mariolle. Je tire une taffe. Naïs prétend ensuite avoir mal, je cache mon air amusé. Bien sûr, j'connais la technique. C'est peut être même moi qui l'ait un peu élaboré. T'es K.O mon bro ! Je t'avais dit, t'es pas prêt. J'ai presque envie d'aller faire un tope là à Naïs, je me résigne au dernier moment.

"Ça vaaa? Va aider ton amoureuse Théo!" m'exclamais-je en allant aider Naïs qui avait mal a la cheville. Ou plutot faisait genre d'avoir mal a la cheville. Elle profitait de mon moment de gentilesse pour me foutre au sol. "Whooo la connasse j'suis choqué!". Je ne peux m'empecher de rire, puis lorsque Théo me dit qu'il savait qu'elle me mettrait KO. "J'vais porter plainte!" disais-je, en mode Gorge Profonde! Car il n'y a que lui pour dire ca. Puis d'un coup je me relève, porte Naïs et demande a Théo si "Elle ne mérite pas d'aller un peu dans la piscine?" en rigolant.

mdr comme il est naïf Steven. Il s'est passé quoi entre SS10 et maintenant ? Il s'est fragilisé le pauvre. Bien évidemment qu'il s'est fait avoir comme un bleu. Il se venge directement, en voulant jeter Naïs dans la piscine. Attends, tu me proposes de venger des années de combats perdus ? M'en branle si elle le mérite ! J'aide Steven à porter Naïs jusqu'à la piscine. Par contre dépêche, elle fait son poids. Je murmure très fort, dans le but de me faire entendre par Naïs.

J'arrêtais très vite de rire lorsque Steven me soulevait, direction la piscine. Théo ne tardait pas à le rejoindre pour l'aider en disant que je pesais mon poids. Je prenais mon air de gamine capricieuse. « Arrête de mentir, c'est pas vrai, je suis pas grosse ! » D'autant plus que j'avais perdu du poids depuis quelques semaines. Je finis par rire. « Allez posez moi ! »

Je fais genre de croire totalement en ce que je dis. T'as un peu trop forcé sur les chocolats ces derniers jours. Outch, c'est pas très malin ça. On reste serein. Avec Steven, on quitte le jardin, portant Naïs à bout de bras. Qu'elle en profite, une fois dans l'eau, ce sera autre chose !

Je bouge #PrayForNaïs #Miskina

Tout en ayant mon verre dans une main et en tirant délicatement Emmanuelle de l'autre, j'arrive dans le jardin et nous emmène tous les deux jusqu'aux fauteuils en bois tissé. Je lui souris et l'invite à s'asseoir la première, l'imitant à peine fut elle assise. Je lui souris une fois que nous sommes tous les deux assis l'un en face de l'autre. Le silence et d'or et ni elle ni moi ne commençons la conversation immédiatement. La pulsion de notre danse a laissé la place à un calme olympien, un silence incroyable mais sans pour autant qu'il n'en devienne pesant. Au contraire. Il est chargé d'émotions. Il est pleins de connotations, et je sens des tas et des tas d'émotions traverser le jardin grâce à nos seuls regards inhibés l'un en l'autre. Je finis malgré tout par briser ce moment d'intimité fragile et délicat, pour demander, presque en chuchotant, comme pour ne garder ces précieuses secondes uniquement pour nous, comme pour ne pas rompre ce pacte silencieux qui commençait à nous unir : "Alors Emmanuelle, je dis tout bas en souriant doucement, parle moi de toi. D'où tu viens, qu'est-ce qui t'as poussé à venir ici une première fois, et à y revenir maintenant ?" Laisse moi découvrir les subtilités en toi, les échos, les émotions, les accords. Je veux entendre toute ta partition. Je veux connaître tes symphonies, je veux te découvrir, toi, juste toi, entière.

Mes doigts glissent particulièrement bien entre ceux de Matthew, comme si la forme de nos mains avaient été conçues pour s'assembler. Je le laisse m'emmener à l'extérieur du salon, loin des lourds échos des basses et de l'euphorie des candidats. Le ciel, d'un bleu nuit, abrite quelques étoiles lumineuses, qui attirent mon attention pour quelques secondes furtives. Finalement, Matthew et moi, nous retrouvons assis. Prêts à décoller pour un nouveau voyage, plus soft, moins périlleux, mais pas moins intense. Je pose mon verre par terre, décidant de m'allumer un joint - premier de l'aventure, et prenant soin de lui en proposer un aussi. Ayant tiré ma première latte, je crache ma fumée en direction des astres alors que mon regard se raccroche à celui du jeune homme. Inlassablement.  « J'ai toujours rêvé d'une vie au soleil. Déjà petite, je me trimbalais plus en sous-vêtements qu'en cols roulés, et ça, ça a sûrement dû être difficile à vivre pour mon père, qui était pasteur. » Je laisse échapper un rire cristallin, légèrement nostalgique, qui se perd dans le silence nocturne.  « J'ai participé une première fois à Secret dans l'espoir de remporter le gros chèque, pour changer de vie! Ce que je n'ai pas réussi. Mais cette émission a été un tremplin dans ma vie, à ma sortie, on m'a proposé des contrats, plus ou moins gros, qui ont pu me bercer sur un lit de maille. » Beaucoup de souvenirs. « Depuis, je vis là où j'ai toujours rêvé de vivre. Loin d'ici, loin des caméras, loin des problèmes. Chez moi, il n'y a que les cocktails fruités, le soleil qui brille et les vagues pour surfer! J'espère d'ailleurs pouvoir en faire mon métier. » C'est mon plus grand rêve, et je n'y renoncerai pas tant que j'y aurais pas accédé! « Si je suis ici, c'est en grande partie pour Théo. Une semaine avec lui, ça ne se refuse pas! Puis, je voulais vérifier que je n'avais pas eu tord de m'éclipser des médias! Même si depuis ce début d'aventure, le contraire m'a été prouvé, je n'ai fais que des belles rencontres et y'a eu aucun problèmes! » Je souris, sincèrement. La bonne ambiance dans la maison, elle n'est pas donnée à toutes les saisons! A croire que les all stars sont vraiment la crème de la crème! Je laisse finalement un nouveau silence s'installer, tirant sur le bijoux tenu habilement entre mes doigts, sans pour autant relâcher la pression de mon regard sur celui de Matthew. Après quelques secondes, je chuchote, un sourire en coin. « Qui es-tu, Matthew? » Pas qu'un bon danseur, j'imagine.

Le moment est aérien. Emmanuelle m'emmène dans une discussion à la fois fluide, douce et délicate. Comme sur un nuage, ou plutôt comme dans les nuages, je me laisse bercer par cette bribe d'étoile à la voix angélique. Alors qu'elle commence à parler d'elle, doucement, à me raconter d'où elle vient, qui elle est, je ne peux m'empêcher de la dévorer du regard. Elle est à la fois si complexe et si humaine. Je l'écoute attentivement, riant lorsqu'elle ri, souriant lorsqu'elle sourit. Son enfance, voluptueuse et réchauffée, a laissé la place au soleil et aux vagues. Emmanuelle a toujours aimé vivre de ce qu'elle jugeait essentiel, laissant s'envoler le superflu et fonçant vers ses propres objectifs. C'est une battante au coeur fragile mais bien armé à travers laquelle on peut lire comme dans un livre ouvert, à condition de lui prêter suffisamment d'attention. Lorsqu'elle en a terminé avec elle, elle me parle un peu de sa relation avec Théo, et j'y descelle un amour passionnel presque secret, comme caché. Et je souris lorsqu'elle finit par se taire et me fixer droit dans les yeux. Le silence plane quelques secondes, je prends sa main délicatement dans la mienne, et me contente de souffler "Merci". Lorsqu'elle me demande qui je suis, je me relève du canapé et l'entraîne avec moi jusque dans l'herbe ou je m'y allonge le premier. Lorsque nous sommes tous les deux là, sur le dos, main dans la main d'une part, et tenant notre cigarette de l'autre, je commence, les yeux perdus dans la nuit et les étoiles : "Je ne suis peut-être pas ce que tout le monde croit, je dis à voix basse, presque comme un aveux, je veux dire, bien sûr que je suis le même que la plupart des gens connaissent, mais je me cache derrière mes artifices. Si je fais du cinéma, c'est pour vivre d'autres vies par procuration, pour mieux dissimuler ce que je suis entre les différentes images. Pour être quelqu'un d'autre, pour m'adapter aux situations ... Je tire longuement sur ma cigarette, laisse la fumée s'inhiber en moi, puis le recrache délicatement tout en caressant la main d'Emmanuelle. J'ai longtemps joué un rôle. Pour plaire à la fois à mon père et à ma mère. Pour être parfait sur tous les plans. Être sans fausse note. Et j'ai aimé jouer ce faux-moi pendant tant d'années. J'aime toujours le faire à vrai dire, m'immiscer dans des corps qui ne sont pas les miens. Je ris un peu nerveusement, puis laisse encore s'écouler quelques secondes. Les étoiles semblent briller de plus en plus forts au dessus de nous. Notre voyage devient plus profond, nous devenons plus personnels, plus proches. Alors voilà, le cinéma, c'est pour me cacher avant tout. Et au delà de ça, je suis quelqu'un d'assez classique je dirai. Qui aime la drague, incontestablement, qui a une peur folle de s'engager et qui peine à faire confiance en les gens, je ris et ajoute, assez contradictoire vu tout ce que je te raconte là, pas vrai ? Mais toujours est-il que j'ai tendance à me méfier des autres, à ne pas les laisser devenir trop proches de moi. Pour être sur qu'ils ne m'atteignent pas. Comme pour m'en protéger, et indirectement me protéger de moi même. Parce que je ne sais pas, j'ai peur de trop m'attacher aux gens, tu comprends ? Je laisse couler de nouveaux quelques secondes, puis, comme pour changer un peu de sujet, car je venais de déballer beaucoup de ma vie, j'ajoute : si je pouvais t'emmener dans les étoiles, maintenant, tu me suivrais ?"

J'arrive au jardin, Matthew et Emmanuelle sont plus loin. Je me fais discret, je ne veux pas me faire remarquer. Je viens quand même assez prêt pour pouvoir entendre ce qui se dit. J'évite d'allumer ma clope pour l'instant, pour pas me faire cramer. Matthew, il parle de lui. C'est fluide, c'est pur. Vivre par procuration, se cacher derrière des artifices. C'est profondément humain, étonnant. Lui qui essaye de laisser transparaître un manichéisme quasi maladif, une ligne droite, bien tracée, qui dépasse pas d'un cm. Au fond, il prend sans cesse des trains qui dévient de chemin. Il est aussi paumé que moi. Aussi paumé qu'Emma. Un gamin à son niveau, en somme. J'ai un sourire jusque par-terre, Matthew, il relève du véritable magicien. Lui, il a pas besoin de baguettes magiques, simplement ses mots. Je me fais discret, j'veux pas détruire ce moment. Mais moi je le suivrais dans les étoiles, et bien plus loin encore. Dans les confins de l'espace, ceux qui ont pas encore été explorés. Parce qu'il y a quelque chose  d'enivrant dans l'exclusivité. Il ne peut appartenir qu'à nous, se vivre intensément puis mourir au fond de nos coeurs, dans l'ignorance du reste du monde.

C'est comme un coup de foudre. C'est un truc de pur, de beau, de vrai. On est frappés par la douceur des étoiles, nos corps s’embellissent d'ecchymoses astrales. Le ciel nous chante sa berceuse, et on se laisse emporter, par la mélodie du vent et de la nuit. Là, allongée dans l'herbe, le regard vers l'au-dessus, dans ma tête, ça danse sur un requiem. Une symphonie d'une nouvelle dimension, et je souris bêtement en m'en rendant compte. Avec Matthew, on accède à l'inaccessible. C'est comme un autre monde. Une autre planète. Dans l'cosmos d'une ère nouvelle. C'est l'osmose qui nous scelle. « T'es quelqu'un de bien. » je chuchote, après ses confessions. J'ai laissé tomber ma tête sur le côté, abandonnant la vue sur les étoiles pour celle de son visage. Ce beau visage, qui m'apparaît comme familier. Le genre de visage que je suis sûre d'avoir déjà vu quelque part, mais dont j'ai seulement dû rêver. Parce que je l'imagine comme ça, Matthew. Un putain de rêve éveillé. « Je te suivrais. » Je serre sa main. Allez viens, on y va Matthew. Je ferme les yeux, j'imagine, j'ai l'coeur qui s'envole. Loin du jardin. Loin de l'émission depuis laquelle nous sommes entrain d'être filmés. C'est un moment précieux. Trop pour qu'il puisse appartenir à d'autres.

Combien d'fois j'ai rêvé de ce voyage à travers l'espace? Combien d'fois j'ai rêvé d'ailleurs? Matthew, il m'y amène. Il n'a pas peur, il m'y amène. J'me sens légère, j'me sens bien. C'est comme trop beau pour être vrai. 

Les étoiles me bercent et me rassurent. Elles me soufflent délicatement dans l'oreille que non, je n'en ai pas trop dit. Ces mêmes étoiles qui disent en chuchotant que tu as bien fait de lâcher prise, Matthew, les gens ne sont pas tous foncièrement mauvais. Je souris lorsqu'Emmanuelle resserre la pression sur ma main. Je suis bien à ce moment précis, comme ailleurs, physiquement ici mais mentalement déjà bien loin. Dans les nuages, dans cette immensité noire tachetée de blancs, comme l'artiste qui a renversé son pot de peinture, je me perds entre les comètes. Je m'y laisse voguer aux côtés d'Emmanuelle qui a accepté mon voyage. Nos mains sont toujours plus proches, et finalement, alors que nous sommes perdus, comme flottant, dans la galaxie, nos regards se croisent. Ils s'échangent, communiquent, parlent. Nous sommes l'un face à l'autre, et je n'y descelle rien de malsain. Notre relation est là, pure, honnête. Nous sommes deux êtres vibrants et s'étant offerts l'un à l'autre. Je lui souris sincèrement, naïvement peut-être, mais je ne peux m'en empêcher. Nos mains restent là l'une dans l'autre, et je souffle une nouvelle fois, le plus sincèrement que je ne l'ai certainement jamais fait : "Merci". Emmanuelle et ce genre d'éclat lunaire au milieu de la nuit. Mieux qu'un rayon de soleil, elle ne vous éblouit pas, elle vous éclaire et vous guide. A tel point que j'en viens à lui demander, toujours tout doucement, puisque c'est notre manière d'échanger, à voix basse : "S'il ne te restait qu'une seule journée à vivre Emmanuelle, qu'est-ce que tu réaliserais ?"