[Jamaica] • La réalité en face • Matthovu

M O N T E G O • B A Y ( J A M A I C A )
M A T T H E W ft. K O V U

Après 14 heures de vol en compagnie de mon père et de ma belle-mère (Aka Milo et Hestia), voilà que notre avion se pose finalement en Jamaïque dans la sublime ville de Montego Bay. Le jet lag se fait ressentir, on a comme ralentit le temps, comme rallongé la nuit. Et on se pose à l'orée du jour, là ou le soleil point à peine le bout de son nez, alors que nous sommes partis au milieu des ténèbres froids de Paris. 14 heures de vol, c'est le temps qu'il m'a fallu pour me perdre dans mes pensées, dans ce que j'allais dire, dans ce que j'allais faire, une fois que j'aurais Kovu en face de moi. 14 heures, c'est aussi suffisamment de temps pour profiter de mon père et d'avoir une discussion plus profonde avec lui que pendant les deux semaines de la saison All-Star réunies. Je descends de l'avion et fais quelques pas lents et incertains le temps que le sang circule normalement dans mes jambes. J'ai à peine eu le temps de dormir, l'espace de deux ou trois heures tout au plus. Et je sens que la fatigue me tiraille un peu. Je fais un bisou à ma famille (mes deux parents ) et quitte l'aéroport une fois avoir récupéré mes deux valises. J'hèle un taxis et lui demande de me déposer à l'hôtel Sunscape Splash, un des plus beaux hôtels de la ville situés en bord de mer. La conversation avec le chauffeur se fait en anglais, faute de ne pouvoir lui parler en français. Il me dépose devant ladite résidence une dizaine de minutes plus tard. Je lui laisse un bon pourboire et rejoins le hall d'entrée. D'une armature faite de bois, l'hôtel offre une vision chaleureuse et colorée typique de la Jamaïque. Je me laisse bercer quelques instants par l'ambiance sucrée et pure de l'espace lorsqu'un guichetier viens à ma rencontre et propose de récupérer mes affaires. J'acquiesce et le laisse se charger des valises tandis que je reviens sur terre. Je commande ensuite une chambre pour deux personnes, au cas où, à 296 euros la nuit. Mais il faut ce qu'il faut pour pouvoir prouver à Kovu que je suis prêt à tout pour le garder avec moi. Une fois le badge me permettant d'entrer dans ma chambre en ma possession, je quitte le Sunscape Splash et décide de sortir trouver une cabine téléphonique. Chose assez difficile en 2017, mais pas impossible en Jamaïque. Je glisse quelques pièces à l'intérieur - que j'ai gentiment demander au guichetier de me donner - puis compose le numéro de Kovu. Je sens mon coeur s'accélérer dans ma poitrine de plus en plus. A chaque tonalité j'ai l'impression qu'il va me lâcher, que je vais m'évanouir. Puis le beau brun fini par décrocher au bout du fil. "Ko...Kovu. C'est moi, c'est Matthew. Ca te dirait qu'on se voit, genre ... Dans 10 minutes ?"

Mon téléphone sonne, me tirant de mes beaux rêves, de mes belles aventures. Je n'ai pas encore totalement décuvé de cette soirée d'hier. En levant la tête, j'aperçois tout ce monde qui dort à la maison. Des personnes que j'aime, d'autres que je ne connais pas. C'est ce qui fait le charme de ce genre de moments. Je me revois hier, à danser sur les rythmes des percussions. Certains se plaignent du bruit de la sonnerie, j'espère secrètement que quelqu'un décroche à ma place, mais personne. Je finis par me lever, en enjambant les multiples corps encore endormis qui me font obstacle pour atteindre le salon. Mmh.. Oui, allô ? Dis-je de ma voix toute endormie.

''C'est moi, Matthew...'' De l'adrénaline qui s'injecte dans mes veines. Le réveil est immédiat. Entendre sa voix me rempli d'un bonheur si particulier, inexplicable. J'ai tellement de questions à lui poser sur le pourquoi de cet appel, mais il ne m'en laisse pas le temps. Il me propose de se voir. Donc il a fait le voyage jusqu'ici, rien que pour me voir? Mais... tu n'es pas aux all-stars ? Ce serait avec... plaisir ! Juste pas chez moi. Je regarde le salon, des dizaines de personnes endormies. Il y a un bordel monstre ! Tu connais le Blue Beat Ultra Lounge ? Retrouvons là-bas ! J'emporte mon téléphone portable jusque dans la salle de bain. Malgré les promesses faîtes, cela faisait bien trop longtemps que je n'avais plus entendu sa voix. Je l'ai attendu cet appel... Il y a aucun doute, tu sais toujours autant te faire désirer !

Kovu paraît encore tout enfariné, et pour cause, il est à peine neuf heures ici. Et il ne souffre d'aucun décalage horaire actuellement, donc son cerveau n'a aucun problème à réaliser que le soleil se lève à peine alors qu'il est sensé être bientôt seize heures, heure française. Je souris en tenant le combiné entre mes doigts alors que j'entends la voix de mon beau black. Je l'entends bouger et refermer une porte derrière lui. Sans doute ne veut-il pas réveiller sa fille. "Les all-stars se sont terminées y'a quoi ? Seize heures ? Je dis dans un petit rire cristallin. C'est le temps qu'il m'a fallut pour venir ici". Il me propose ensuite le nom d'un bar, et je vois mon nombre d'unité qui tendent à disparaître. On va bientôt être coupé si je ne raccroche pas. Alors que je m'apprête à accepter de le retrouver audit Blue Beat Ultra Lounge, il m'avoue qu'il a attendu cet appel. Je me mords la lèvre inférieure en laissant couler quelques secondes d'un silence léger mais lourd de sens. Avant de raccrocher, je me contente de souffler : "Ca fait tellement de bien de t'entendre ..." Je repose le combiné et quitte la cabine. J'inspire un grand coup. Mon coeur bat si fort dans ma poitrine qu'il serait presque capable de briser mes côtes. Je reste là, m'adossant contre un mur, reprenant mon souffle. Il m'attendait. Il m'attendait, c'est ce qu'il a dit. Je n'ai pas une minute à perdre, je dois me rendre au bar qu'il m'a proposé. Blue Beat Ultra Lounge, prononcé avec une voix à la fois super sexy mais tellement endormie. Impossible de l'oublier.
Je me perds dans les rues de Montego Bay pendant une dizaine de minutes, flirtant entre les différentes enseignes, me laissant bercer par ce morceau de paradis que je visite en ce moment même. Et c'est purement par hasard que je tombe sur le bar à mi-chemin entre pub et boîte de nuit. Pas étonnant que Kovu m'ai donné rendez-vous ici. "Toujours aussi fêtard" je me souffle à moi même en poussant la porte du club. L'ambiance y est chic et décontractée, mais plus moderne que dans le reste de la ville. On sent les influences américaines dominer le bar. Je repère des lampes à lumière noires, sûrement pour des soirées fluorescentes, mais il faut croire que la journée le bar se mue en une espèce de café, où tous les rideaux sont tirés et les fenêtres grandes ouvertes et ou des tables occupent la piste de danse. Je m'installe à l'une d'entre elles en attendant Kovu. Je sais qu'il va venir. Mais mon coeur bat à tout rompre. Je m'imagine ces retrouvailles depuis si longtemps.

Les All-Stars se sont terminés il y a peine seize heures. Tu comptes Kovu, 14 heures d'avion pour faire Paris-Montengo Bay. Oui, il a directement sauté dans un avion pour venir te voir. Pourquoi ? C'est si soudain, ça sent l'annonce importante. Les rêveries se mêlent à un peu d'appréhension. Donc je suppose que t'as pas gagné... Je ris doucement, pour faire le moins de bruit possible. Après lui avoir donné rendez vous, je lui ai confié l'attente qu'avait suscité cet appel en moi. Je voulais le connaître, le Matthew loin du jeu, celui que j'avais découvert, pas le gros con qui avait laissé la compétition prendre le dessus sur des choses plus importantes. Mon petit sourire devient très grand. Il est content de m'entendre et moi c'est tout pareil. Mais je l'ai déjà peu fait comprendre.

Après avoir raccroché, je me prépare pour nos retrouvailles. Le basique, histoire de prendre le moins de temps possible et d'aller retrouver plus vite Matthew. J'arrive finalement assez vite devant le bar, m'allumant un bédo. Après en avoir tiré un grand coup, et par la même occasion expirer pour recracher toute la fumée, je me décide à rentrer. Sérieux, dans ces moments là, on se pose toujours des questions idiotes. Quelle démarche je dois adopter ? Genre le mec baba cool ? De toute façon, je veux dire, je ne sais marcher que d'une manière en soi. Bref. Je capte son regard et j'oublie toutes mes questions. Je fonce vers lui comme un enfant. Mattheeeeew ! Je recule mon visage de son cou pour l'analyser de fond en comble. Ses lèvres, ses yeux, ses cernes étirés. Regarde moi ça ! Même avec le jet lag, t'arrive encore à être beau ! Je prends ensuite place à ces côtés, tirant un nouveau coup de mon bédo. Je ne tiens vraiment pas en place, ça fait si longteeemps ! Alors, la Jamaïque, ça dit quoi ? C'est le paradis ici, hein ?

JOYEUX ANNIVERSAIRE MON ALEEEX D AMOUR  

Je ne parviens pas à déceler s'il s'agit de tristesse ou d'une petite moquerie quand il suppose (et qu'il suppose bien) que je n'ai pas gagné. Rapidement et avant quoi que se soit d'autre, je me contente de répondre "Parce que je cours après un autre trophée Kovu ..". Notre conversation se termine ensuite.

Mon coeur s'accélère. Il étouffe dans ma poitrine devenue bien trop petite pour contenir toutes les pulsations à la minute que je délivre à mon pauvre corps. Je me sens oppressé comme à travers moi même, mais je fais tout pour que rien ne transparaisse. Les minutes défilent à une vitesse qui se veut toujours plus faible, et je sens les secondes s'égrener sans que je ne puisse rien faire pour que le temps reprenne son cours normal. "Ok, on arrête tout, on commence même pas : je t'aime", non, trop brutal. "Depuis la seconde ou j'ai merdé avec toi, je regrette, je t'aime". Non, toujours pas. "Je sais pas ou tu en es sentimentalement parlant, mais moi j'en suis encore à toi, je t'aime". Non. Non. Non. "Je ..." Il ouvre la porte du bar et mon coeur s'arrête. Il est là, face à moi, et lorsque nos regards se croisent le sien s'illumine et il vient se jeter dans mes bras. Je le sers si fort contre moi, tellement fort, comme si je ne l'avais pas revu depuis une éternité, comme s'il avait failli perdre la vie, comme si il venait de revenir d'entre les morts. Je le respire, je m'inhibe de son parfum, de son odeur, de son être tout entier alors que nos corps sont collés l'un contre l'autre et que ses lèvres effleurent mon cou. Je me contente de garder le silence en même temps que je prolonge notre étreinte. Hors de question que je le laisse s'échapper maintenant, je veux qu'il reste au plus prêt de moi le plus longtemps possible (aussi longtemps que l'éternité nous le permettra). On finit malgré tout par se séparer, et son sourire m'illumine comme l'aurait fait le soleil. Il me complimente et je ne peux m'empêcher de rire bêtement à sa petite remarque vis-à-vis de ma beauté et du jet lag. "Et toi même avec quatre grammes dans le sang tu restes impeccable, je dis avec un petit clin d'oeil avant d'ajouter, l'odeur du rhum t'as trahi !" Le stress a complètement disparu à la seconde même ou son corps a effleuré le mien, et pour pallier à toute nouvelle crise de panique à l'intérieur de mon coeur, je ne peux m'empêcher de poser ma main sur la sienne alors qu'il la laissait trainer sur la table. Sa peau est si douce. Son visage est si lisse, si fluide, si limpide. Il m'a tellement manqué. Je dévore du regard ses yeux, son nez, sa bouche, lui tout entier. Je ne pourrais rêver mieux comme vacances. Et même si je ne suis pas venu ici pour ça au départ, Kovu est mon graal en terme de voyage. Il me demande ensuite ce que je pense de son pays, de sa Jamaïque. "Elle s'est illuminée à la seconde ou tu es rentré dans la pièce, je dis en continuant de fixer ses pupilles, puis ses lèvres, puis ses joues, la Jamaïque toute entière est devenue plus belle, encore plus belle que ce que j'avais imaginé, tout aussi belle que quand tu me la racontais". Je ne peux regarder ailleurs que ses jolis traits, son visage m'a tellement manqué. Sa voix résonne en moi et fais échos à mes sens les plus profonds. Et à l'instant même ou je l'ai vu, j'ai su que je ne m'étais pas trompé, que venir ici était la bonne décision. Je n'avais pas d'autre choix. Kovu est l'homme de ma vie. Je caresse doucement sa main et lui demande à mon tour : "Et toi alors, comment ça se passe ici ... Ta vie, ta famille, tes ... amours, tes plongées ?"

Je peux pas cacher ma déception quand il découvre que je suis pas totalement clean. J'ai pas fait illusion, c'est pas faute d'avoir essayé. Je baisse instinctivement le regard, pourquoi cette rencontre m'intimide-t-elle autant ? L'envie de plonger mon regard dans le sien est pourtant grande, je me connais, j'sais que j'arriverai à savoir lequel des Matthew j'ai en face de moi. Maudit rhum... Je roule des yeux pour accompagner mes paroles, dans un long soupir. Je retourne enfin les mots de Matthew dans ma tête ''impeccable'' et je me sens brûlé de l'intérieur. Je trouve le courage de relever le regard et de dévisager le beau brun. ''Impeccable'', c'est vraiment le seul beau mot que tu as trouvé à me dire, hein ?

Il l'a sûrement compris, parce que lorsqu'il me parle de mon pays. Ce sentiment de satisfaction de savoir que pour lui Jamaïque rime avec Kovu. Même si mes origines ne sont pas ici, j'ai adopté la Jamaïque, elle m'offrait la possibilité d'être insaisissable, de fuir le temps. Et j'espère que ça lui fera pareil à lui. Je ne veux pas qu'il se perde, qu'il oublie ce qui est vraiment important pour lui. Tu n'as pas encore goûté aux joies des feux de camps sous les étoiles, avec le bruit des vagues, les percussions, les gens qui dansent... Et Matthew peut compter sur moi pour laver cet affront dès que possible. Alors que nos mains se croisent, s'enlacent, il me demande comment ça se passe pour moi. Rien n'a changé. J'ai repris strictement la même vie qu'avant Secret Story. Je travaille quand je le veux, parfois, je m'arrête et je partage un gros bédo avec des inconnus, des touristes. Une vie de rêve, en somme. Mais tu sais, certaines personnes me manquent. Ma fille, Danaë, Romane, Léonie... Je marque une pause, taquin, ayant complètement conscience de la torture que cette révélation pouvait provoquer en Matthew. Et toi aussi... Finis-je par avouer, après laisser planer le doute un petit moment. Peut-être que j'aurais dû participer aux all stars. Te savoir là bas, avec Milo et toute la bande, ça m'a rendu nostalgique ! C'était comment ? Tu as apprécié ton aventure ?

La main de Kovu se retourne et serre nos paumes l'une contre l'autre. Nos doigts s'entrelacent et je sens comme des vibrations parcourir mon corps tout entier. Je souris naïvement alors qu'il me parle des longues soirées sur la plage à regarder les étoiles. J'ai déjà commencé à expérimenter les soirées comme ça, sans rien pour faire barrage si non autre que les astres, il ne me manque que le sable ... et lui. "C'est une invitation ?" Je demande avec un léger sourire avant de baisser le regard vers nos mains toujours l'une dans l'autre. Je resserre ses doigts entre les miens. Sa peau m'avait manqué, son contact, son odeur. Il me raconte ensuite comment tout est redevenu normal depuis sa sortie, comment la sphère médiatique l'a oublié, comment il a repris le cours d'une vie normale dans un endroit (presque) normal. Puis le rêve semble comme s'effondrer à la seconde où il mentionne les manques de sa fille et de Danaë. Je concentre tous mes efforts pour ne pas grimacer alors que mon nom ne fait pas parti de la liste. Je resserre un peu trop ma main contre la sienne, avant de relever le regard et de le plonger dans le sien. Je n'ai pas le temps de répondre, qu'il abrège mes souffrances et finit par concéder que, moi aussi, je faisais parti des gens qui lui manquaient. Et il enchaîne directement sur le sujet de la saison All stars. Plutôt que de répondre directement à sa question, je décide d'en poser une à mon tour. "Ta fille n'est pas ici ? Je croyais qu'elle vivait ici, avec lui. Pourquoi elle lui manquerait alors ? Je décide de faire abstraction du sujet de Danaë pour le moment. La All Stars était tellement différente de la saison 10, tu peux même pas t'imaginer ! Danaë Danaë Danaë. J'ai rencontré des gens tellement géniaux là-dedans, je ne me suis pas pris la tête une fois, c'était vraiment comme des vacances. La seule motivation pour sortir de la maison c'était venir te retrouver. Danaë Danaë Danaë. Mais ... Je continue de le fixer de plus belle, puis je craque : Comment ça va tes amours ?". Et c'est là que mon coeur s'arrête, et que j'ai conscience que tout se joue. Je regrette déjà d'avoir posé la question, mais elle vient de se jeter sur la table, d'un seul coup, presque malgré moi.

Une invitation ? Kovu secoue doucement la tête, à la négatif. Non, une obligation ! Je ne te laisserai pas repartir avant que ce ne soit fait. C'est ça son vrai chez lui, des nuits d'ivresses qui laissent s'envoler les problèmes, dans l'air vaporeux des joints qui se mélangent. Mon regard capte son air absent, je sais à quoi c'est dû et ça me fait bien rire. A quel moment j'suis devenu aussi sadique ? Peut-être que moi aussi, j'ai envie de le faire morfler un peu, même si tout ce qui a pu se passer de mauvais durant notre saison, ça ne comptait pas réellement. Non. Sa vie se trouve auprès de Lorena... Son école, ses amis. J'essaye de lui rendre visite le plus souvent possible. C'est un réel manque, que je comblerai sans doute un jour, si j'en ai réellement le courage. Pour l'instant, tout m'oblige à rester en Jamaïque. Matthew semble avoir apprécier les all stars: il y a rencontré des géniaux. A croire que je ne suis pas le seul à avoir changé. Et le jeu Matthew ? Je m'arrête sur la fin de sa phrase, c'est moi, sa seule motivation pour avoir quitté les all-stars. Je suis sa liberté, son indépendance. Sans que je puisse vraiment me contenir, un sourire satisfait se creuse au fil de la discussion. Il n'y a pas grand chose à en dire. Je vis des histoires d'amour tous les jours... Mon regard brillant croise celui de Matthew. Et ça m'a manqué de pouvoir te dire je t'aime. Mes dents viennent mordre ma lèvre inférieure. J'ai jamais réussi à faire de distinction, à accorder de l'importance qu'à une seule personne. Matthew fait parti des autres, celles et ceux qui sont différents. Je vais commander, j'ai soif. Je lève le bras et appelle le serveur. Deux cocktails Rastafari. Quand les cocktails arrivent, j'en glisse un à Matthew. Cela pourrait devenir le meilleur cocktail de ta vie si tu t'en donnes la possibilité.

Une obligation ? Je ris à sa remarque et rétorque immédiatement : "Alors s'il te plait, faisons ça le plus tard possible. Je ne veux pas rentrer tout de suite". Je veux rester avec toi. Je capte ensuite une étincelle dans son regard, comme s'il se délectait de mon moment de flottement, comme s'il se jouait de moi. Mais je ne dis rien, je l'écoute me parler de sa fille, qui vit avec sa mère. Lorena ... J'ai du mal à l'imaginer maman, vraiment du mal. Elle s'est faite discrète depuis la fin de la saison 10, mais j'en garde un souvenir assez vif, intense et avec des teintes d'immaturité parfois. Mais une maman ? Pas vraiment. Pourquoi pas ? Je plonge mon regard dans celui du beau black qui décide de jouer au jeu de l'ascenseur émotionnel avec moi. Pourquoi est-ce qu'il fait ça ? Il vit des histoires d'amour tous les jours. Mon coeur se serre tellement fort d'un seul coup. Ca lui a manqué de me dire je t'aime ... "Ca m'a aussi manqué de l'entendre ..." Je dis à mon tour en continuant de le regarder, avec moins d'insistance cette fois, le regard plus évasif, plus dilaté, tandis que mon coeur peine à reprendre un rythme normal. Un peu perdu dans moi même. Heureusement pour moi, Kovu se lève et commande deux cocktails. Lorsqu'ils arrivent à notre table, j'ai repris un peu de contenance et tente de faire bonne figure. Je crois que je ne saisis pas vraiment ce qu'il essaye de me dire en disant que ce cocktail pourrait devenir le meilleur de ma vie. J'hésite quelque seconde, regarde le verre en face de moi, puis replonge mon regard dans celui de Kovu en disant : "Je ne crains qu'il en faille plus, pour qu'il devienne aussi mémorable ...".

Je baisse légèrement le regard à sa remarque. Il peut y croire, je ne vais rien faire pour qu'il parte trop vite. Son arrivé ici, je l'ai bien trop attendu. On a encore pleins de choses à vivre, à faire, voire même à confirmer. J'incline ensuite la tête après lui avoir ré-affirmer mes sentiments. J'avoue que je ne sais pas trop ce que ça peut signifier pour lui, il n'y a que son regard brillant, son sourire satisfait, deux indices qui s'envolent sous le poids des non-dits. Je pars finalement commander et reviens avec deux cocktails. Rien de mieux pour étancher sa soif, surtout en Jamaïque où le soleil ne nous quitte jamais vraiment. Et que voudrais-tu de plus ? Question totalement rhétorique, je le sais parfaitement. Matthew, quel homme insassiable, sans cesse à la recherche de plus que ce qu'il a. C'est comme ça que je l'aime, puissant, ambitieux...

Vert. Jaune. Rouge. Rastafari. Cocktail aux reflets colorés Jamaïcains au travers duquel mes pupilles se perdent et se dilatent. Je tiens le verre entre mes mains et réfléchis à cent à l'heure. Mon regard détourné de celui de Kovu. Je rassemble tout mon courage, essaye d'assembler ma contenance en une forme cohérente et uniforme, puis relève les yeux. "Tu me demandes vraiment ce que je veux Kovu ? Je demande en arquant un sourcil avant de boire une gorgée de mon cocktail et en plongeant mon regard dans le sien. Ca ne te paraît pas éperdument évident ?". Je le fixe avec insistance.  "Ce que je veux le plus Kovu, tu peux le deviner tout seul, rien qu'en regardant ces deux cocktails". Identiques. Que je n'ai pas choisi. Sur lesquels je n'ai intervenu à aucun moment. Et ça Kovu, je ne le fais jamais. Je cherche toujours à garder un contrôle sur les choses, de prêt ou de loin, quelles qu'elles soient, même s'il s'agit d'un simple cocktail. Le silence s'étire, le temps se dilate, nous restons muets pendant plusieurs secondes. Puis je reprends la parole, à demi-mots, prêts inaudibles. "La question, Kovu, la vraie, c'est jusqu'où tu es prêt à aller ? Je le regarde de plus en plus intensément. Et avec qui".

Après ma question, y'a ce sourire espiègle et enfantin qui veut pas partir de ma face. Je le dévisage totalement, un peu sans le vouloir. Je me délecte de le voir se faire violence pour moi, pour me prouver qu'il sait où il va. Mais je le connais, quasiment sur les bouts des doigts et j'sais qu'il est totalement paumé. Quand il parle de nos cocktails, je bug dessus un long moment, me mordillant férocement la lèvre inférieur. Lorsqu'il me pose la fameuse question, j'arrive pas à dévier mon regard vers lui, absorbé par la symbolique de nos deux cocktails identiques. Et à ce moment précis, la réponse à sa question me semble évidente. Je te veux toi. Je me penche pour venir embrasser ses lèvres, dans la fougue du moment. C'est intense, nerveux, amoureux. Trois sentiments qui nous résumes bien.

La question, aussi osée soit-elle, semble plonger Kovu dans une réflexion vive et qui active tous ses sens. Son regard se perd quelques secondes dans nos cocktails puis il le replonge à l'intérieur du mien. Si les yeux avaient pu communiquer, j'aurais juré que nous étions entrain d'échanger bien plus qu'un coup d'oeil attiré et attirant, bien plus que de simples mots, plus même que de l'amour avec un grand A. C'est toujours comme ça avec Kovu, les choses se déchaînent d'un seul coup, alors qu'on pense tous les deux qu'elles sont prêtes à s'enliser, et alors à partir de là les sensations se décuplent. Je te veux toi. La phrase peint un sourire immédiat sur mon visage, que j'aurais aimé contenir, que j'aurais aimé dissimulé pour ne pas craquer trop vite, mais impossible de le cacher. J'étais venu pour ça, pour savoir ce qu'il voulait précisément avec moi, et voilà qu'il venait de me donner la réponse dans une simple phrase. Il s'approche alors de moi et nos lèvres s'effleurent, se touchent, communiquent. Le baiser se rallonge, devient plus fougueux, plus intense, et alors que Kovu avait pris les devants pour m'embrasser, je prends sa tête entre mes mains et le fait se reculer doucement. J'en profite pour le fixer d'un regard plein de vie et de feu, un regard qui le veut lui, entier, maintenant. Je maintiens toujours son visage et le caresse doucement avec mon pouce tout en me délectant de l'avoir, lui, tout prêt de moi, pour moi. Je souris et reste muet quelques secondes de plus avant d'ajouter dans un léger : "Bonne réponse, Kovu". Puis je l'embrasse à nouveau tandis que nos cocktails aux reflets de la Jamaïque attendent toujours sur la table. Rien d'autre n'importe à présent, le regard du barman ou des autres passants ne provoque rien d'autre que de la satisfaction en moi, j'ai envie de crier au monde l'amour qui s'éveille en moi, j'ai envie de balancer sur tous les toits que Kovu fait désormais parti de ma vie.

Je profite de l'instant à fond: pour une fois, on ne tourne pas autour du pot. En arrivant en Jamaïque, il avait passé le dernier test. Avec son regard brûlant, il s'est occupé d'effacer les derniers incertitudes. Même si je suis incapable de lui certifier d'aimer personne d'autre, je peux au moins lui promettre de l'aimer assez fort pour qu'il n'ait jamais à partir. Je le sers de mes bras, l'empêche de partir. C'est à moi de lui prouver que peu importe où il ira, ce sera toujours mieux avec moi que sans, et je vais m'y employer à présent. Viens, on se barre ! J'ai un endroit à te montrer. Dis-je en me reculant, dans un grand sourire, plutôt fier de l'idée que je viens d'avoir. Je le prends par le bras et quitte le bar en sa compagnie, oubliant complètement les cocktails. Tu vas voir comment c'est facile de s'effacer ici. D'être totalement seuls. Parce que c'est tout ce que je voulais. Être seul avec lui, le garder égoïstement, sans que personne d'autre puisse le voir, le toucher, lui parler. En chemin, je peux pas m'empêcher le silence qui s'installe, même si il est tout sauf pesant. Quelque chose à changer en toi... Tu es beau quand tu respires le bonheur comme ça...

Entre deux baisers, Kovu me propose de quitter le Blue Beat Ultra Lounge pour nous retrouver un peu tous les deux, rien que tous les deux. J'accepte dans un sourire taquin et me laisse entraîner par le bras hors du bar. Je ne lâche que rarement prise, mais aujourd'hui, maintenant, à partir de cet instant précis, j'ai envie de découvrir ce que ça fait de se laisser porter par quelqu'un comme Kovu. J'ai envie d'apprendre à vivre une nouvelle vie, quelque chose de plus subtile, plus voluptueux, mais qui ne dénature pas l'ardeur de notre relation et de nos regards. Je veux un mélange de miel et de piment, je veux à la fois jouer la lune et le soleil. Nous commençons à peine à marcher lorsqu'il me souffle doucement qu'ici, en Jamaïque, se faire oublier et bien plus facile que n'importe où ailleurs. Je ris à l'idée qu'il m'emmène dans un endroit isolé, ou seuls nous deux profiterions de l'avenir, du décor, de l'ambiance et des parfums. Ou lui profiterait de moi et ou je jouirais du plaisir de pouvoir le regarder sans avoir la crainte qu'il ne s'envole. Une phrase me démange les lèvres, j'aimerais lui chuchoter que peu importe combien de temps on s'efface, peu importe si les gens nous surprennent ... J'ai envie d'être surpris avec toi, je veux que les gens nous voient ensemble. Mais je ne le dis pas, en échange, je réponds "S'effacer loin des caméras, ça faisait longtemps qu'on en avait besoin, pas vrai ?" Je lui souris et repense aux fois où, bloqué par les caméras, Kovu avait reculé. Aux fois où, à l'inverse boosté par les caméras, j'avais forcé Kovu à battre en retraite. Mais c'est à présent du passé, et seul l'instant actuel compte désormais. Je prends sa main dans la mienne tandis que nous marchons, et plutôt que de nous laisser bercés dans le silence, il me fait alors remarquer que quelque chose a changé en moi, que le bonheur s'est inhibé dans mes veines et que ça se ressent de l'extérieur. Je lui souris alors, plonge mon regard dans le sien et réponds : "Comment je pourrais ne pas respirer le bonheur ? En à peine une heure, tout vient de changer." Nous continuons de marcher main dans la main, j'en profite pour lui voler un bisou de temps à autres, parce que j'ai attendu de l'avoir avec moi, pour moi, trop longtemps. En à peine une heure, mon coeur a comme explosé et j'ai découvert un éventail de sensations que je ne connaissais pas, du frissonnement de tout mon corps à l'instant même ou ses lèvres effleurent les miennes ou du sentiment de pleinitude lorsque nos mains sont l'une dans l'autre. Je décide de renchérir : "Mais tu as raison, je sais que j'ai changé, mais j'ai juste réalisé que j'avais besoin de toi dans ma vie, parce que je ne pouvais pas faire autrement, tu es devenu indispensable pour moi".

Nous voilà partis pour une escapade. Elle ressemble à ça, ma vie. Des décisions sur des coups de têtes, pas beaucoup de concret. Sur la route, je ne peux pas m'empêcher de le regarder, plutôt fier. Il en a fait du chemin depuis cette saison 10. Ouais enfin, tu en avais plus besoin que moi... Je détourne le regard de Matthew pour garder mon sérieux. Je fais un peu référence à cette scène dans le confessionnal où j'avais fini par me reculer et le laisser en plan. Nous arrivons finalement à l'endroit, une grotte à l'abri de tous et presque jamais fréquenté. L'eau y est d'une clarté hallucinante, tout comme sa tranquilité. Ils prévoient d'autres All Stars ? Tu devrais penser à t'y inscrire, faut croire que ça te fait du bien... Je prends Matthew par la main et l'emmène plus loin sur la petite plage qui se trouvait de l'autre côté de la grotte. Mon père me ramenait souvent ici plus jeune. Je m'allonge sur le sable, le regard levé vers le ciel, plutôt content d'avoir eu le courage de ramener Matthew par ici. Je ne sais pas où ces retrouvailles nous mènerons, mais c'est pas grave. Je vis le jour le jour, et j'fais en sorte que chaque jour soit différent.

Kovu me pique en disant que j'avais plus besoin de m'échapper des caméras que lui. Je ne peux malheureusement qu'acquiescer, tout en resserrant sa main dans la mienne comme pour me donner la confirmation qu'il est réellement à mes côtés, je me contente de répondre doucement, "Elles ont un effet nocif sur moi, je le sais ...", à mi-chemin entre le regret et le souvenir, les caméras m'ont transformé en quelqu'un que je croyais être mais que je n'étais pas. Un être du jeu et du mensonge, de la trahison et d'égoïsme. Mais je ne voulais plus de cette image, et j'avais tenté de la gommer dans la saison All-Stars qui s'était terminée il y a deux jours. Je verrais par la suite si ça m'a réussi ou non. Kovu me guide, il me mène dans des endroits que je connais pas et où le tourisme s'évanouit peu à peu, entre les falaises, les morceaux d'océan et les plages éphémères et cristallines ou personne n'ose se glisser. Il nous attire jusqu'à l'intérieur d'une petite grotte, endroit idyllique ou seul le sable sera notre ennemi. On pénètre dans la grotte à l'intérieur de laquelle un léger filet d'eau la traverse de bout en bout, et tout en marchant Kovu me demande si d'autres saisons All Stars sont prévues. "Il est encore trop tôt pour le dire, mais une chose est sûre, je l'arrête d'un seul coup et le force à se tourner vers moi, nos visages se rapprochent à nouveau, tout proche je ne veux pas retourner là-bas sans toi", je n'ose pas l'embrasser en cet instant. Est-il prêt à retourner dans la maison ? A risqué de se replonger sous les caméras ? A me laisser gommer mes erreurs du passé alors même que je les ai commise là-bas. On reprend notre marche ensuite - après peut-être un bisou ? - et Kovu finit par s'allonger dans le sable à l'autre bout de la grotte. Il me confesse que son père l'emmenait souvent ici dans sa jeunesse. Je m'allonge à ces côtés, ma tête adossée à son torse, et me laisse bercer par le calme et le silence, ma main part à la recherche de la sienne et se plonge à l'intérieur. Nous restons là, silencieux, pendant de longues minutes, le temps semble se dilater mais je profite de chaque seconde à ses côtés. Puis je me redresse et l'entraîne avec moi jusque dans l'eau. Je retire mon tee-shirt puis m'enfonce dans l'océan jusqu'à mon nombril, le beau black à mes côtés. Je me tourne ensuite vers lui et le prends dans mes bras, je me colle à lui jusqu'à sentir son souffle dans mon cou. Je lui dis alors doucement "Je ne te demanderais pas de me promettre quoi que se soit, je sais ce qu'être avec toi implique, je veux juste profiter du moment présent, parce que j'ai déjà perdu trop de temps", et que je n'en gâcherais plus une seule seconde, tant que tu auras envie d'être avec moi.